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LE VIDE GRENIER COCTEAU

"La révélation de soi
est l'annihilation de soi."
Abel Ferrara, The addiction

Le principe du vide grenier est simple : on achète des morceaux de trottoir pour y exposer à la vente les souvenirs de toute une vie. Ca gagne de la place à la maison et ça rapporte (un peu) d’argent. Pratique. C’est ce qu’ont dû se dire les organisateurs de la "grande" rétrospective Cocteau, au Centre Georges Pompidou.

Il est sans doute intéressant de rendre hommage à ce surréaliste génial dont les films féeriques ont à jamais marqué le cinéma, les poèmes la littérature, et les dessins Jean Marais.

Mais il est des artistes dont l’œuvre se prête mal à une rétrospective. Parce qu’il est inscrit avant tout dans l’esprit et non la réalité, le travail de Cocteau ne saurait satisfaire à ce genre de grand-messe. Sur des dizaines de mètres, tout ce qui porte la plume de Cocteau, et même ce qui ne la porte pas, est exposé sur une interminable table – qui serait bien plus utile pour le concours de la plus grande saucisse du monde.

Il est sans doute très intéressant de savoir que Jean Cocteau écrivait à Jean Marais – il se dit même qu’ils ne faisaient pas que correspondre – mais exposer les enveloppes de ces lettres, certes portant la marque du « génie », est d’un inintérêt assez terrifiant. On se consolera avec ses dessins érotiques et autres extraits de ses films emblématiques.

Mais pas avec "Le juke-box Jean Cocteau", et encore moins avec certains écrans montrant en images de synthèse des projections de son œuvre. Beaubourg est grand, alors on le remplit… Agréable sensation de promiscuité de la culture lorsqu’on se retrouve coincé entre une grand-mère extatique et un Américain égaré autour d’un vide saisissant.

Surtout, on n’oubliera pas d’acheter le magnet, la taie d’oreiller, le tapis souris ou le t-shirt Cocteau en sortant. Pour pouvoir dire à ses amis : "Comment ? Vous n’avez pas fait l’expo Cocteau ?". Supermarché culturel, l'exposition ressemble plus que jamais à un musée Ikea à l'itinéraire linéaire, destiné à vendre des produits dérivés la sortie venue.

Avec un minimum de recul, on préférera, si cette visite du Centre Pompidou est obligatoire, découvrir l’œuvre méconnue de Roni Horn ou la rétrospective sur le couple Robert et Sonia Delaunay. Mais pas ce grand n’importe quoi Cocteau. Il méritait tellement mieux.

Christophe Chohin.

Le programme complet du Centre Georges Pompidou (Jean Cocteau, Roni Horn et les Delaunay) : www.cnac-gp.fr/Pompidou/Accueil.nsf